Kickstarter, Ulule, KissKiss Bank Bank, Patreon, Tipee,….Nombreux sont les sites de financement participatif créés ces dernières années. Ce modèle économique a ne cesse de croître et nombreux sont ceux qui s’y sont essayé, avec plus ou moins de succès.

Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, le crowdfunding (financement participatif) est un système qui permet à tout un chacun de devenir investisseur d’un projet auquel il croit. Généralement, cet investissement amène des rétributions dépendantes de la somme investie. L’argent ainsi récolté permet au projet de voir le jour et parfois même, de proposer plus que ce qui était prévu initialement.

Un formidable vivier d’idées

Crowdfunding__Beleg_in_een_goed_idee-300x149Le financement participatif est un formidable outil pour permettre le développement de projets qui n’auraient sans doute jamais pu voir le jour sans. De nombreuses personnes y ont recours pour supporter les coûts de fabrication d’un appareil, les coûts de productions d’un film, d’une série, d’un CD,,….Les idées peuvent être infinies.

Plusieurs exemples célèbres existent comme la pebble, l’oculus Rift ou plus proche de nous, la Web-série Noob,…. Tous ces exemples n’auraient sans doute jamais vu le jour sans ce nouveau modèle économique ou tout du moins rencontré le même engouement. En effet, quel producteur aurait accepté de miser autant d’argent sur la réalisation d’un film par une bande d’amateurs ayant créé une web-série autour de l’univers des MMORPG?

Certes, tous les projets n’atteignent pas les records de somme engendrés par ceux cités ci-dessus (1) mais beaucoup ont réussi à trouver les fonds nécessaires à la réalisation d’une idée à laquelle aucun investisseur n’aurait voulu croire.

Pas sans risques

Pourtant, ce que le grand public semble parfois oublier, c’est qu’il existe aussi des risques.  En effet, si le budget demandé n’est pas atteint, les sommes ne sont pas prélevées. Par contre, lorsque le budget bien atteint, le créateur de ce financement reçoit son argent, mais rien ne garantit les contreparties.

Pour illustrer ce problème, je vais prendre un cas personnel, la montre connectée Kreyos. La promesse était belle, une montre jolie proposant mieux que la concurrence du moment. Ni une ni deux, avec deux connaissances (@dzrider et @larnoufe), nous décidons de soutenir le projet.

Le financement arrive à son terme et l’argent est donc prélevé. Mais les mois passent et la montre n’arrive pas. Le fabricant accuse retard sur retard. Heureusement pour nous, nous avons eu la présence d’esprit de demander le remboursement,ce qui nous a été accordé. Car quelques mois plus tard, Kreyos annonçait que la montre ne verrait jamais le jour et que l’argent ne pourrait pas être rendu aux investisseurs.

S’il ne faut pas en faire une généralité, il faut malgré tout être conscient que ce type de problèmes peut exister. Dans ce système, le public joue le rôle d’investisseur en apportant les subsides nécessaires à la création d’un projet auquel il croit. À ce titre, il accepte de donner son argent sans certitude d’en tirer un profit.

Peu de gens ont conscience de cet état de fait et oublient que si le projet est un succès, ils récupéreront des contreparties, mais si celui-ci est un échec, rien n’oblige l’initiateur du projet à rembourser ses investisseurs.

La nouvelle étude de marché

kickstarter-clones-v2-300x181A l’origine, le crowdfunding a été pensé pour permettre à de petits projets sans moyens de voir le jour. Mais très vite, les producteurs de contenu y ont vu un formidable moyen de palper le marché.

Il faut savoir que le rôle d’un producteur (de jeux-vidéos par exemple) est de dénicher les talents de demain et d’oser parier sur leur réussite en investissant son argent dans la création de leur contenu et leur promotion.

Quand il investit, il sait que le risque existe et qu’il est possible qu’il ne rentre pas dans ses frais, mais il croit au produit et fera tout pour que cela fonctionne. Le problème est qu’en se servant du crowdfunding comme un moyen de doser le public (un peu à la manière d’une prévente), on le détourne de son objectif principal. Cela peut amener à une certaine lassitude de devoir payer pour financer les projets de gens qui ont les moyens de se financer seuls.

De plus, le producteur a l’habitude de prendre ce risque et sait  les projets auxquels il peut croire ou non. Il a un regard et un recul particulier que le public n’a pas forcément et peut amener des idées totalement nouvelles dont le public pense ne pas avoir envie et qui finissent par devenir des révolutions.

Si plus aucun n’ose prendre de risques et s’investir pour proposer des choses parfois à contre-courant, on risque de s’enfermer dans des projets aseptiser, sans aucune nouveauté ni audace et qui respectent à la lettre ce que le public demande. Une perspective très dommageable surtout lorsqu’il s’agit de domaines culturels.

Faire participer les fans

ImpressionA contrario, il arrive parfois que certains producteurs n’aient pas le nez assez creux. C’est là que les fans interviennent. Prenons le cas de la série Véronica Mars. Son créateur, Rob Thomas, désirait faire un film après l’arrêt de la série. Il a soumis l’idée à de nombreuses chaînes/maisons de productions, mais s’est vu refouler à chaque fois.

Il a donc décidé de faire appel à sa communauté pour financer le film et a réussi son parti en engrangeant 5.702.153 $.

Une autre mouvance est également apparue avec des services comme Patreon ou Tipee. Ces derniers permettent non plus de financer de manière unique un projet, mais de contribuer à son existence et au travail de son créateur de manière régulière. Les créateurs peuvent choisir de demander une somme mensuelle ou à chaque nouvelle sortie de contenu.

Ce cas de figure s’applique essentiellement aux podcasteurs et/ou youtubeurs et leur permet même parfois d’en vivre. A l’image de Patrick Beja, podcasteur reconnus dans le monde francophone et depuis peu, podcasteur professionnel grâce à un Patron pour le moins réussi.

Mais pourquoi  choisir de payer pour un contenu de ce type alors qu’il est mis gratuitement à disposition sur Internet? Et pourquoi choisir de payer quelqu’un qui a décidé de faire ça par passion? Un drôle de concept, quelqu’un qui fait du ski par passion ne va pas demander aux internautes de payer le matériel servant à sa passion. Autant de questions que j’ai décidé de poser à quelqu’un qui a justement tenté l’aventure. Je laisse donc la parole à Jonhatan, créateur des podcasts Voyagecast et Anthropodcast qui s’est lancé dans le financement participatif via la plateforme Patreon : http://www.patreon.com/voyagecast

Pour répondre, prenons ton skieur, excellent exemple. Tant qu’il skie pour sa pomme, en solo, à part ses parents on se doute en effet qu’il ne va pas être financé. Mais imaginons qu’il se mette à skier en semi-pro, à faire de la compétition… que se passera-t-il ? Il lui faudra de l’argent, pour pouvoir se ménager du temps pour l’entrainement, payer son matériel, ses déplacements, etc. Cet argent, il va le chercher chez des sponsors, il va essayer de faire des contrats publicitaires, s’il est bon il aura même des donateurs anonymes et un fan-club qui va récolter des fonds. Tu vois ou je veux en venir ?

Ceux qui donnent un peu d’argent pour soutenir un podcast sont des « fans », des auditeurs qui voient une réelle utilité personnelle au podcast, et qui ont envie de lui filer un coup de main. Ils ne paient pas pour du matériel, ils aident à produire un contenu qu’ils aiment. Personnellement, j’aime mieux filer quelques euros à un podcasteur que je suis depuis des années que payer ma redevance TV, là au moins je paie pour un contenu que je consomme, et en plus je choisis le montant ! Et puis, c’est souvent la résultante d’une relation personnelle avec les auditeurs, s’ils nous voyaient comme des méchants capitalistes avides, ils ne donneraient rien.

À titre personnel, j’ai eu contact avec presque tous ceux qui me soutiennent sur Patreon, et certains trouvent simplement normal de donner quelque chose. L’un d’eux, en Chine, m’a même dit qu’il avait calibré son don par rapport à une séance de cinéma. Il m’a dit que payer une dizaine d’euros pour 2 heures de film était normal, donc payer pour plus de 2 heures de podcast l’était aussi. D’ailleurs, la plupart s’en fichent complètement des « récompenses », ils donnent vraiment pour le podcast, la définition même du don en fait. D’où l’importance capitale d’avoir une communauté forte, de répondre à tous les commentaires, à tous les mails, à tous les tweets, de passer du temps à discuter et même filer des coups de main, c’est en donnant gratuitement d’abord qu’on peut ensuite envisager de demander un peu d’aide en retour.

Conclusion

En conclusion je dirais que le crowdfunding est un merveilleux moyen d’aider des projets auxquels on croit ou qu’on aime suivre. Il est juste important de ne pas oublier qu’il s’agit avant tout d’un investissement sans aucune garantie ni obligation légale.

Il convient également de se renseigner sur les projets qu’on y trouve, leur origine, les personnes derrière etc….Mais après un peu de recherche ou si vous connaissez les personnes que vous souhaitez soutenir et avez envie de vous engager et de leur faire confiance, n’hésitez pas, foncez! Non seulement vous pourriez recevoir des contreparties intéressantes, mais en plus, vous aurez la joie d’avoir aidé à la création de quelque chose qui vous tient à coeur.

Au fait, avant de vous quitter, je tenais à préciser que j’ai volontairement omis de parler de certains projets ridicules comme la salade de pomme de terre. Pour moi, il s’agit plus d’une vaste blague qu’autre chose et ça ne sert qu’à démontrer l’absurdité de certains sur Internet. Ce n’était pas le propos de mon article mais si vous voulez en parler, les commentaires sont tout à vous 😉

  1. La Pebble a atteint le chiffre record de 10.266.845 $, L’oculus Rift 2.437.429 $ et Noob le film 681 046 €